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dimanche 10 juin 2012

Des 1001 lectures de l’affaire du DAI


Le DAI signifie Droits annuels d'inscription, ce qui indique que chaque élève qui est inscrit doit en plus des frais d'inscription pour l'année (déclinés en trois tranches) verser au moment de l'inscription un droit particulier.
Celui-ci s'ajoute pour les nouveaux entrants dans le réseau aux DPI, droits de première inscription.

Les DAI sont annoncés au printemps 2010, ce qui ajouté à une forte augmentation des frais de scolarité et à une réévaluation du DPI met le feu aux poudres.
On sait qu'à ce moment, les choix politiques de Sarkozy conduisait mécaniquement à cette augmentation : transférer vers les établissements la compétence immobilière et diminuer la part des titulaires (expatriés et résidents) en les remplaçant par des recrutés locaux. Les charges des établissements s’alourdissent ce qui implique une augmentation des frais de scolarité. De plus, la PEC (prise en charge) qui permet la gratuité de la scolarité pour les enfants français (d'abord en terminale, puis en première...) réduit les rentrées d'argent des lycées.
Les parents mais aussi les enseignants sont mécontents de ces nouvelles dispositions et leur action (non conjointe) débouche sur un accord négocié par les représentants élus, et quelque peu décalé par rapport aux attentes des grévistes très nombreux du Lycée Lyautey. Je ne reviens pas sur ces accords, présentés dans ce blog mais qui ne font porter les DAI que sur les nouveaux élèves, et l’année qui suit leur arrivée.

Comme les établissement ont désormais la responsabilité des gros travaux  et que ceux-ci sont plus que nécessaires (augmentation des effectifs à la fois pour augmenter les rentrées financières et pour faire face au nombre croissant des ayants droit, tandis que les accords avec le Maroc imposent un nombre d'élèves marocains signifiants), bientôt, les DAI sont présentés comme devant servir à ces restructurations. Ce fléchage peut permettre de faire accepter ces fameux DAI. De fait ils vont permettre de lancer un programme de travaux important, notamment construire un nouveau collège sur le site de Beaulieu et faire un nouveau bâtiment scientifique. Ceux-ci devaient commencer cet été et résultaient de vrais besoins.

Cependant, l'accord de 2010 était boiteux (tous les élèves ne relevaient pas d'un même système) et prêtait le flanc à des problèmes juridiques ennuyeux. Pour échapper à de tels risques, il est décidé, cette année 2012 lors de laquelle les premiers DAI sont versés, de revenir sur cet accord en assujettissant tous les enfants scolarisés au DAI.
Le mécontentement des parents est immédiatement très fort : manifestations, pétitions, recours juridique, et du fait du contexte électoral appel aux élus pour dénoncer le DAI, réclamer sa suppression arguant du fait que les parents n'ont pas à financer le patrimoine immobilier de l'AEFE (nouvel argument qui pourtant affleurait fréquemment lors des questions des parents dans le cadre des Conseils de groupement de gestion)!
Lors du CA du 6 juin, la directrice de l'AEFE, face à toutes ces revendications, annonce la suspension des DAI et l'ouverture de discussions avec les parents.

Et les personnels dans tout ça ?
Aujourd'hui, les positions syndicales sont discordantes.
Après qu'un groupe de professeurs du lycée Lyautey a demandé l'exonération, les négociations avec le SCAC et l'Agence auxquelles ne participent que le SNES et l'UNSA-SE (non représenté au lycée Lyautey) qui ont des élus, débouchent sur l'acceptation de la remise en question de l'accord de 2010 en obtenant la garantie d'un différentiel satisfaisant entre le montant des frais dans leur totalité (y compris DAI) et l'avantage familial perçu.

L'AEFE connait cette revendication, la seule qu'elle entend puisqu'elle est portée par les syndicats représentés; et sait qu'elle peut toujours trouver un accord dès que ce "delta" leur est assuré. La FSU de son côté, trouve intérêt à ces discussions qui confortent son pouvoir et son apparente combativité puisqu'elle défend bec et ongle ce fameux "delta".
Sud qui n'est présent qu'au lycée Lyautey réclame l'exonération en usant de moyens d'action radicaux (non paiement des frais de scolarité de leurs enfants; appel à la grève le 12 juin 2e jour du bac); le Sgen tente de faire entendre un autre point de vue largement développé ici : qu'on se batte pour une vraie cause, la gratuité assorti d'un avantage familial pour tous les personnels.

Revenons à la situation présente.
Le 6 juin, la directrice décide la suspension. Quelles sont les conséquences sachant que les intérêts des parents ne recoupent pas strictement les intérêts des personnels (les élus ne réclament pas la suppression du DAI) ; sachant qu'un programme de rénovation du lycée est en cours, sachant que l'on ne sait plus très bien quelle est la mission de l'AEFE ? Certes aller dans le sens de l'excellence mais comment et pour qui ?
- De plus en plus de contrats locaux, sans doute souvent très compétents, mais utilisés comme variable d'ajustement en leur donnant/imposant les classes en trop, celles dont on ne veut pas, les heures sup, les remplacements inopinés dans l'année qu'ils ne pourront pas vraiment refuser... Toute pratique allant à l'encontre de la justice.
- De plus en plus de professeurs qui quittent les conditions difficiles de l'enseignement en France et qui sont prêts, quitte à perdre la sécurité de l'emploi, à accepter de devenir contrats locaux.
- De plus en plus d'élèves dont les parents peuvent payer sans que l'on se préoccupe de leur volonté d'adhérer à notre système d'enseignement et à nos valeurs, leur objectif étant la réussite économique, ou plutôt le moyen de pérenniser la réussite économique de la famille, ce qui va à l'encontre de l'idée que l'on se fait de notre mission : ne rêverait-on pas de permettre aux meilleurs de réussir même s'ils ne sont pas issus de l'élite économique du pays et ne doit-on pas offrir aux enfants français l’enseignement qui leur permet de réussir ? Alors que l'on attend de nous la rentabilisation de l’investissement fait par les parents en les faisant entrer à la "Mission".
Combien d’enfants sont-ils les oubliés du système (pour des raisons financières mais aussi parce qu'ils sont un peu différents) ?
- De plus en plus d'élèves issus des "retours au pays", des ayants droit français donc, qui font augmenter les effectifs mais quine s’accommodent pas toujours facilement de l’enseignement élitiste encore largement dominant au lycée Lyautey.

Sans oublier que la situation de Lyautey n'est pas exactement celle de l'ensemble de l'enseignement français au Maroc, et que la situation au Maroc n'est certainement pas semblable à celle d'autres régions du monde, les problèmes de l'heure qui se focalisent ici autour du DAI font penser que l'AEFE est à une nouvelle croisée des chemins. Dans le nouveau contexte politique, on ne pourra échapper à toutes ces questions : celle de la nature de la mission d'une telle Agence n'est sûrement pas la moindre.

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