Permettez-moi de vous livrer quelques-unes de mes réflexions après une semaine particulièrement pénible.
Nous (professeurs et direction du lycée) voguons sur le même navire : nous partageons des intérêts communs, pas seulement comme vous l’avez dit, celui d’œuvrer pour le rayonnement du lycée – c’est un autre aspect que je ne compte pas aborder ici.
Nous subissons chacun à nos postes respectifs les caractéristiques de notre public scolaire. Même si en termes de résultats, le niveau moyen des élèves est correct, on ne peut se cacher qu’ils sont difficiles et que beaucoup d’entre eux ont des difficultés scolaires. Ce n’est pas ce qui est le plus gênant. Ce qui l’est davantage, c’est la forte pression qui s’exerce sur eux, du fait de l’ambition de leurs parents, qu’ils reportent sur nous. Dans les matières scientifiques, une infime minorité d’élèves ne suit pas de cours supplémentaires (cours particuliers ou dans les officines qui gravitent autour du lycée).
Ainsi manquent-ils totalement d’autonomie, ne peuvent-ils concevoir un apprentissage autre que résultant du par cœur et ne peuvent-ils dégager l’essentiel.
Les élèves sous pression continuelle, fatigués, sont inefficaces en cours et les professeur doivent apprendre à être intransigeants voire injustes pour ne pas subir les marchandages (notamment sur les notes), et ne pas être dupes des stratégies dont ils usent pour aboutir à leurs fins. Leur objectif étant d’obtenir les écoles prestigieuses auxquelles, compte tenu de leur milieu social, ils estiment avoir droit, quelque soit leur niveau réel.
En quoi sont admirables nos 96% de réussite au bac quand la grande majorité de nos élèves est issue de classes très privilégiées et de surcroît, a bachoté dans le cadre des fameuses boîtes à bac ? Il n’y a donc pas lieu de s’en glorifier.
C’est pour cela, il me semble, qu’on ne devrait plus se gargariser d'aise en évoquant un lycée d’excellence : il y a des élèves en effet, excellents, exceptionnels à tout point de vue mais ils sont rarissimes. De trop vouloir ne voir que l’excellence, on oublie les difficultés dont quelques professeurs sont plus victimes que d’autres, mais que tous connaissent à un degré ou à un autre.
Nous, professeurs, comme vous, personnels de direction, sommes également victimes de cette situation.
Il n'est pas juste que les professeurs payent le prix fort de la "réussite de tous les élèves" alors qu'ils en sont les acteurs majeurs : reconnaissez que l'action syndicale est le principal moyen de les soutenir et si cela conduit à s'opposer à vous, c'est dans le but de trouver des solutions qui permettent de voguer ensemble sur le même navire.
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