Entrevue du Sgen CFDT avec Philippe Couturaud, conseiller culturel
adjoint, Rabat, 16 octobre 2014, 14h00- 15h15
Présents :
- SCAC : Philippe Couturaud, Dominique Deschaud
- Alain Schneider, secrétaire général du Sgen-CFDT étranger,
Claudine Pierre, Sgen-CFDT Maroc
Cette rencontre poursuit une première entrevue qui s’est
déroulée mardi matin pendant 30 minutes avec Philippe Couturaud et Guillaume
Cario, son adjoint. Alain Schneider était accompagné de Pascal Dupuis.
Ce que Philippe Couturaud a voulu surtout nous faire savoir,
c’est qu’il élabore un plan d’action de 3 ans pour le Maroc. Estimant que
si un Inspecteur d’académie a été mis à la tête du système scolaire français, c’est
pour y faire quelque chose. Contrairement à ce qui se serait passé avant lui, il
estime indispensable de procéder à un constat détaillé de la situation présente et de
réfléchir à l’avenir sur cette base. Peu disert sur le contenu concret de son plan malgré notre insistance, il répète vouloir mener une véritable politique, grâce à une autre
gouvernance.
Il regrette qu’année après année, on reconduise sans
réfléchir la situation antérieure, sans aucune vision de l’avenir. Il souhaite
qu’à rebours des habitudes, on puisse rendre compte de la situation réelle au Maroc.
Il reconnait qu’agir au Maroc est plus compliqué que dans les postes qu’il a
eus auparavant (qu’il se plait à rappeler), par exemple à Mayotte car il n’a
pas totalement les mains libres, la gouvernance est pilotée par l’AEFE.
Donc, ce qu’il souhaite, c’est analyser précisément l'offre d'enseignement français au Maroc en prenant en compte son
hétérogénéité, faire adhérer chaque réseau particulier, AEFE, OSUI et les autres types d'enseignement
homologué (qu’il veut pousser à signer des conventions avec l’AEFE) à ses
constats pour avancer. Un premier jet de son plan a été lancé lors du séminaire
de rentrée des chefs d’établissement. Il s’agit, dit-il, de savoir ce qu’on veut
faire de chaque structure ; il s’agit de réfléchir au devenir de l’ensemble.
Les structures sont de fait très différentes ; le
périmètre de l’AEFE est constant, l’OSUI a plus de marges de manœuvre et d’évolution.
Comment faire face à l’augmentation du nombre de la demande, sachant qu’on ne peut
avoir de postes supplémentaires (AEFE), puisque sur le plafond d'emplois s'applique.
L’absence d’analyse objective dans le réseau aboutit à des
situations aberrantes : M. Couturaud se dit frappé par la perte de liens avec
la France, du fait notamment de l’enracinement de nombreux enseignants dans
leurs postes ; par le fait qu’on pose mal les problèmes : notamment
celui des droits de scolarité qui, il le rappelle, sont encore bas, mais
dont il ne faut pas tout attendre. Il souhaite imposer une obligation de
performance à chaque établissement, on ne peut satisfaire toutes les demandes
par exemple en reconduisant chaque année les moyens sans se demander s’ils sont
justifiés et efficaces ; comme le maintien de petits effectifs dans des
options rares.
Il est satisfait d’avoir déjà apporté des solutions à des
situations anormales dont il a hérité comme unifier les règlements intérieurs
de tous les pôles et faire des enseignants d’arabe dans le premier degré des enseignants
comme les autres, avec les mêmes obligations de service, la même pédagogie qui doit être encadrée par l’IEN comme pour les autres langues, qu’ils puissent
travailler en barrettes par groupes de compétence. Il a produit une note
verbale pour que le texte de convention avec le Maroc soit rediscuté car on ne peut
plus sous prétexte de nationalité imposer 5 heures d’arabe à des non
arabophones par exemple. Il compte donc poursuivre ultérieurement son action dans le second
degré.
Le fait que des enseignants expatriés aient la fonction de conseiller
pédagogique – il les nomme ainsi – va de soi ; il ne comprend pas les
réticences par rapport à leur mission ; ils doivent pouvoir entrer dans les
classes ; mais leur rappeler sans cesse qu’ils ne sont pas des inspecteurs n’a guère de
sens.
Parmi les autres sujets abordés, on
peut relever que M. Couturaud nous a assuré que malgré le retard initial, la consultation
relative au socle commun de connaissances de compétences et de culture se
déroulerait également dans les établissements du Maroc.
Il faut bien reconnaitre que M. Couturaud entend peu ce qu’on cherche à lui dire : il a montré sa réticence à associer les organisations
professionnelles et le Sgen-CFDT en particulier, à l’élaboration de son plan de 3 ans car la
gouvernance est si compliquée qu’il préfère aller le plus loin possible dans sa
construction ; ce n’est que lorsqu’il aura tout préparé et tout pensé qu’il
tiendra au courant les partenaires. Donc malgré notre insistance à être
consulté en amont, il est resté plus qu’évasif.
Il ne cherche pas à comprendre ce qu’on lui dit sur les
EEMCP2 ; il s’en prend facilement aux enseignants « conservateurs »,
à
ceux au Maroc qui ne « vivent pas dans le vrai monde ».
Au total, le Sgen-CFDT a demandé à être associé à la réflexion
sur le plan de 3 ans, et a rappelé son attachement au dialogue social. Nous avons insisté sur la nécessité d’une formation continue de qualité
notamment pour les enseignants d’arabe, nous avons remis en perspective certaines
caractéristiques marocaines pour mieux percevoir la situation actuelle, nous
avons rappelé notre attachement à une offre scolaire diversifiée notamment la filière professionnelle
et technique (M. Couturaud pense qu’il serait pertinent de créer à Lyautey une
classe préparatoire économique ouverte aux élèves de sections technologiques et
professionnelles), notre combat pour développer les CHSCT, rares lieux de concertation
où l’on travaille vraiment ensemble, sans affrontement, pour la recherche de solutions.
Mais, même s’il ne le dit pas clairement, son discours
laisse penser qu’il y aura des évolutions à courte échéance : rationaliser,
donner plus d’efficacité, très vraisemblablement
par une diminution du nombre de postes de détachés. En ce qui concerne le
dialogue avec les organisations professionnelles, il semble peu enclin à entamer de vraies discussions cette année, tant
il est persuadé d’avoir permis de grandes avancées l’an dernier. Il est resté
évasif sur la complémentaire retraite des agents de droit local français.
Donc, si le Sgen-CFDT approuve le principe d'une analyse objective
du réseau de l’enseignement français au Maroc, si on ne peut s’opposer a priori à l’objectif de construire un
réseau plus efficace, étant persuadé qu’on ne peut penser l’enseignement français
à l’étranger indépendamment d’une vision d’ensemble, qu’on ne peut ignorer la
situation budgétaire de la France, il est cependant à craindre que ce seront
les chefs d’établissement sous la direction de M. Couturaud et ses adjoints qui établiront les faits "objectifs",
à partir desquels le constat sera tiré et les objectifs à atteindre fixés et
que les personnels ne seront guère entendus.
Le Sgen-CFDT saura rappeler qu'il ne veut pas que l'avenir du réseau au Maroc échappe à ses acteurs, notamment les enseignants.
Pourquoi pas une vaste concertation de l'ensemble des membres de la communauté éducative du Maroc à l'image de celle qu'a organisée naguère Hélène Conway lorsqu'elle était ministre déléguée aux Français de
l’étranger sur l'avenir de l'enseignement français dans le monde ?
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